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Autopsie d'un conflit

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Message  setamir Sam 30 Aoû - 22:59

LE MONDE | 30.08.08 |
Marie Jégo, avec Alexandre Billette, Natalie Nougayrède, Sophie Shihab et Piotr Smolar

Autopsie d'un conflit


Sur les hauteurs de Tskhinvali, "capitale" de l'Ossétie du Sud, la base du bataillon des forces russes de "maintien de la paix" n'est plus que ruine. Les bâtiments où logeaient les soldats, l'unité médicale et les bureaux ont été les premières cibles de l'armée géorgienne lors de son offensive contre la province rebelle, dans la nuit du 7 au 8 août.
Qui a tiré le premier ? Le capitaine Vladimir Ivanov, commandant adjoint du contingent mixte (russe et géorgien) "de paix", est formel : "Les premiers tirs géorgiens ont été déclenchés le 7 au soir, à 23 h 30. Ils ont tiré à l'arme lourde, aux lance-roquettes et lance-grenades, aux obus de 122 mm et de 152 mm. Les tanks T72 situés sur les hauteurs visaient la ville et notre bataillon. A 6 heures, l'assaut a commencé. Les soldats venaient de trois directions différentes : des villages (géorgiens en Ossétie du Sud) de Tamaracheni, Ergneti et Nikosi. A 9 heures, l'aviation géorgienne est venue en soutien."
Pour comprendre, il faut avoir à l'esprit la topographie de l'Ossétie du Sud, l'enchevêtrement de villages ossètes et géorgiens, imbriqués les uns dans les autres. Les deux communautés vivent côte à côte mais dans la méfiance. Le discours est invariable : le fanatique, c'est toujours l'autre... Marqué par les fractures religieuses et ethniques, soumis aux jeux des alliances entre les grandes puissances, le Caucase, la "montagne des peuples", est une zone instable où les braises des conflits passés ne demandent qu'à être ravivées.
Dans cette région de hautes vallées encaissées dans la montagne, le contrôle des sources, des routes et des cols est depuis des siècles l'objet d'âpres luttes entre les différents groupes ethniques. En Ossétie du Sud, pas de cohabitation donc, mais un apartheid en place depuis l'effondrement de l'URSS ; la Géorgie, en proie aux démons du nationalisme, a voulu abolir le statut de région autonome accordé à la province depuis l'époque soviétique.
"Les Ossètes sont des déchets que nous allons expulser par le tunnel de Roki (qui sépare la Géorgie de la Russie)", avait dit à l'époque le président géorgien, Zviad Gamsakhourdia. Il fallait laver l'offense. Soutenue militairement par la Russie, l'Ossétie, après un conflit meurtrier, a fait sécession en 1992. Illustration de ce développement séparé : en Ossétie du Sud, chacune des deux communautés a sa propre conduite de gaz, sa propre arrivée d'eau, sa propre route de contournement ; depuis la sécession, les villageois de l'enclave géorgienne au nord de Tskhinvali peuvent se rendre à Gori (Géorgie) en évitant les villages ossètes. Et les Ossètes, pour aller de Tskhinvali à Djava, au nord de la province, empruntent une déviation afin de ne pas traverser les villages géorgiens. Un seul axe routier principal mène au tunnel de Roki, l'unique porte d'accès à la Russie. C'est par cette passe, un tunnel de 5 kilomètres sous la montagne qui relie l'Ossétie du Nord (Russie) à celle du Sud (Géorgie), que Moscou a envoyé sa 58e armée, le 9 août.

MIKHEÏL SAAKACHVILI, UN "MALADE MENTAL" POUR MOSCOU
Alan Djoussoev, 34 ans, confirme : "le 7 août, je suis allé jouer au basket. Après, on a décidé de se baigner dans la rivière. Puis je suis rentré chez moi. C'est alors que tout a commencé. Je suis descendu au sous-sol pour en sortir quand les bombardements ont cessé, vers 4-5 heures. Puis les tanks sont entrés. On ne s'attendait pas à une telle attaque, la riposte n'était pas très bien organisée. Nous avons réussi à les repousser deux fois, mais on n'aurait pas pu le faire une troisième si les Russes n'étaient pas arrivés, dans l'après-midi du 9 août, pour nous aider."
Le grand frère russe, protecteur de ce petit peuple indo-européen depuis le XVIIIe siècle, ne pouvait rester sans réagir. Aux yeux du Kremlin, l'affaire est entendue : les Géorgiens ont tout déclenché, tuant "2 000 civils" ossètes et 18 soldats russes des forces de "maintien de la paix".
Selon la version russe du conflit, le président géorgien, Mikheïl Saakachvili, profitant de ce que le monde entier avait les yeux tournés vers la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Pékin, a lancé une opération de reconquête par la force de la province séparatiste dans la nuit du 7 au 8 août. Décrit comme "un malade mental", il est déclaré responsable du "génocide" des Ossètes du Sud. Un psychiatre russe a analysé son "syndrome" en direct à la télévision. Il "sera jugé", le parquet militaire russe l'a promis. L'opinion publique adhère. A la télévision, dans les conversations à bâtons rompus autour d'une tasse de thé dans la cuisine, les épithètes pleuvent : Saakachvili, "agent des Etats-Unis", est "un criminel de guerre", "pire qu'Hitler".
Entre Vladimir Poutine et Mikheïl Saakachvili, l'hostilité personnelle est abyssale. Parmi les ingrédients de cette guerre, il y a la vendetta personnelle. Tout oppose l'ancien agent du KGB au caractère froid, formé à Dresde, en ex-Allemagne de l'Est, et nostalgique de la puissance soviétique, et le jeune trublion géorgien, éduqué à la Columbia University, soutenu et applaudi par les Etats-Unis en tant que héraut de la démocratisation dans l'ex-URSS, qui se campe en héritier du roi David le Bâtisseur, artisan de l'unité du pays au XIIe siècle.

LE 7 AOÛT, UNE JOURNÉE DE DUPES
Vu de Tbilissi, le conflit ne commence pas avec l'offensive géorgienne du 7 août, mais avant. En juillet et août, les villages géorgiens de l'enclave (Zemo-Nikozi, Kvemo-Nikozi, Nuli, Avnevi, Eredvi, Ergneti) sont à plusieurs reprises la cible de tirs des séparatistes ossètes. Les 28 et 29 juillet, ils font feu sur un groupe de soldats de la paix et d'observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en route vers les villages de Tchorbaouli et d'Andisi, sans faire de victimes.
Le 1er août, un pick-up transportant six policiers géorgiens explose sous l'effet d'une bombe à retardement, faisant cinq blessés graves. En représailles, Tskhinvali subit des tirs d'artillerie en provenance des villages géorgiens. Le 2 août, les séparatistes ossètes ripostent à l'arme lourde. Tbilissi accuse alors la Russie de fournir les rebelles en armes et en munitions, via le tunnel de Roki.
La guerre éclate le 7 août. Cette journée a comme un parfum de dupes. Alarmé par la situation sur le terrain, le négociateur géorgien, Timour Iakobachvili, décide de se rendre à Tskhinvali, déjà désertée par ses habitants. Là, il attend Iouri Popov, le diplomate russe. En vain. Le diplomate ne peut venir à cause d'une crevaison. Il n'a pas de pneu de rechange !
Le "président" ossète, Edouard Kokoïty, lui non plus ne se déplace pas. Seul Marat Koulakhmetov, le commandant de la "force de paix" mixte, reçoit le négociateur géorgien. Au cours de la conversation, il lui dit son ras-le-bol des séparatistes ossètes, devenus incontrôlables.
Le soir, à 19 heures, Mikheïl Saakachvili, rentré précipitamment d'une cure d'amaigrissement en Italie, déclare un cessez-le-feu côté géorgien. A 22 h 30, deux membres de la "force de paix" géorgienne sont tués et six blessés. Les villages géorgiens de Tamaracheni et de Kourta sont ensuite pilonnés par l'artillerie ossète. Mais il y a plus alarmant. A ce moment précis, les Géorgiens en sont sûrs, une colonne russe de 150 blindés entre dans le tunnel de Roki. L'information leur aurait été transmise par un satellite américain. Moscou niera.
A partir de là, il faut faire vite, sinon l'armée russe sera, dès l'aube, aux abords du pont du Kourta, qui marque l'entrée dans l'enclave. L'armée géorgienne reçoit l'ordre de marcher sur Tskhinvali, l'aviation est mobilisée, les lance-roquettes multiples entrent en action depuis les villages géorgiens. Mais la puissance de feu des séparatistes associée à la supériorité aérienne russe vont vite avoir raison des défenses géorgiennes.

PUNIR LA GÉORGIE
Les militaires géorgiens ont beau avoir été bien entraînés par les "boys" de l'armée américaine, leur matériel a beau être dernier cri (les chars sont dotés de systèmes de vision nocturne à infrarouge et de GPS), ils ne font pas le poids. Les professionnels (37 000 hommes) sont envoyés en première ligne, le reste de la troupe, 100 000 réservistes mal entraînés, est dépassé par les événements. La supériorité aérienne russe est absolue. Pourtant, pendant la guerre éclair, la défense aérienne géorgienne se targue d'avoir abattu 20 appareils russes. Faux, dit Moscou, qui reconnaît toutefois la perte de quatre appareils, dont un bombardier T22 à long rayon d'action.
Le 8 août, Vladimir Poutine est à la manoeuvre. Il rejette tous les arguments que lui soumet Nicolas Sarkozy à Pékin en marge des JO. Le président français tente de le dissuader de lancer son armée à l'assaut : "Donnez-moi quarante-huit heures de cessez-le-feu et j'obtiens le retrait des Géorgiens. - Niet. - Donnez-moi vingt-quatre heures et ils se retirent. - Niet. Ils seront punis !"
La prise de Tskhinvali par les Géorgiens, le 8 août à 14 h 30, sera de courte durée. Le surlendemain, l'armée, défaite, reçoit l'ordre de se retirer. Le 11 août en fin de journée, des colonnes de véhicules font route vers Gori, aux portes de l'enclave séparatiste, pourchassées par l'aviation russe. La guerre est finie, l'occupation russe commence. Il faut punir la Géorgie, l'affaiblir aussi afin de couper court à ses aspirations de rejoindre l'OTAN.
Grisés par leur victoire, les Russes sont prêts à tout. Le ministre des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, confie à son homologue américaine, Condoleezza Rice, que la Russie n'acceptera jamais de négocier avec Mikheïl Saakachvili : il doit partir. Aux yeux de Moscou, la "révolution des roses" de 2003, qui a porté "Micha" au pouvoir, n'était qu'un vaste complot orchestré par Washington.Suite............


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Message  setamir Sam 30 Aoû - 23:25

LE MONDE | 30.08.08 |

Autopsie d'un conflit


...suite et fin

CÔTÉ RUSSE, L'ÉTAU MILITAIRE ÉTAIT PRÊT
Depuis quand la guerre était-elle en préparation ? "L'armée russe savait que la Géorgie préparait une offensive. Mais l'état-major croyait que le premier coup serait porté contre l'Abkhazie (l'autre province séparatiste de Géorgie) par voie de terre et de mer. Cette hypothèse était envisagée depuis deux ou trois ans. Quelques jours avant l'offensive contre Tskhinvali, des troupes aéroportées ont donc été transférées vers l'Abkhazie", a expliqué au Monde l'expert militaire russe Viktor Baranets.
La présence de troupes russes du génie, déployées au printemps en Abkhazie pour réparer la voie ferrée abkhaze (le tronçon entre Otchamtchira, le port abkhaze où 5 000 soldats russes ont débarqué le 10 août, et Soukhoumi), découlait donc de cette hypothèse ? Réponse de l'expert : "Si notre armée répare des lignes de chemin de fer, n'importe quel imbécile peut comprendre qu'il s'agit de préparatifs en vue d'un transfert de troupes ! Les Géorgiens ne pouvaient pas ne pas comprendre ce dont il s'agissait. C'était un message à l'adresse des Géorgiens !"
Les Russes avaient préparé l'étau militaire dans lequel ils allaient enserrer la Géorgie. Vladimir Poutine attendait une occasion à saisir. Les bâtiments russes de la flotte de la mer Noire, affirme une source haut placée au ministère de la défense d'un pays européen, ne peuvent pas appareiller dans des délais aussi courts - quelques heures -, "il leur faut des jours pour être prêts, étant donné leur état de vétusté". La coordination des opérations navales, aériennes, et terrestres russes, dans la pénétration du territoire géorgien, témoigne de cette anticipation. Impossible, soulignent les experts, d'envoyer en quarante-huit heures 20 000 hommes et 2 000 chars en Géorgie sans avoir rien préparé.
En fait, la guerre était en gestation depuis longtemps. Le premier coup de semonce date de la déclaration d'indépendance du Kosovo, le 17 février. Vladimir Poutine, encore président pour quelques semaines, fait alors savoir qu'il y aura des conséquences sur les conflits non résolus de l'ex-URSS, donc sur les régions séparatistes de Géorgie.
Le 16 avril, au moment du sommet de l'OTAN à Bucarest, la Géorgie et l'Ukraine voient pas se confirmer leur espoir d'adhérer un jour à l'Organisation du traité de l'Atlantique nord. L'élite politico-militaire russe, qui ne s'est jamais consolée de la perte de l'empire, tsariste ou soviétique, est prête à tout pour contrer une nouvelle expansion de l'Alliance atlantique à ses frontières. Dominer l'espace postsoviétique, reconquérir cette zone considérée par la Russie comme relevant de la sphère de ses intérêts traditionnels : tel est l'un des objectifs affichés par le Kremlin.
Parce qu'il comprend qu'il ne pourra pas entraver les aspirations atlantistes de la Géorgie et de l'Ukraine, Vladimir Poutine signe un décret autorisant l'établissement de relations officielles entre la Russie et les entités sécessionnistes géorgiennes. Le 21 avril, Mikheïl Saakachvili lui téléphone, le prie de revenir sur sa décision. Le dirigeant géorgien évoque les soutiens que lui apporte l'Ouest. Le président russe lui répond : "Tes déclarations occidentales, tu peux te les mettre au c..."

GÉORGIE - ETATS-UNIS, SIX ANS DE COOPÉRATION
Brusquement, la situation se dégrade en Abkhazie. Un drone géorgien, de fabrication israélienne, y est abattu, un incident rapporté dans un document de l'ONU. Le risque de déflagration semble alors plus grand en Abkhazie, sur le littoral de la mer Noire, qu'en Ossétie du Sud, région agricole sans grand intérêt stratégique. Mais l'Ossétie du Sud, avec ses "hommes aux épaulettes" inféodés au Kremlin, s'est avérée plus facile à déstabiliser.
Entre le mois d'avril et le déclenchement de la guerre en août, Washington n'a eu de cesse de mettre en garde la direction géorgienne : surtout ne pas céder aux provocations russes, ne pas lancer d'opération armée vers l'une ou l'autre des enclaves séparatistes. Les renseignements américains, qui surveillent les concentrations de troupes russes dans le nord du Caucase, préviennent Mikheïl Saakachvili que s'il agit, les représailles russes seront importantes, avec une campagne de bombardements aériens.
Les Américains sont renseignés en direct sur les envies géorgiennes d'en découdre : depuis des années, ils ont des conseillers dans les structures de sécurité et au ministère de la défense à Tbilissi. Les premiers "bérets verts" (forces spéciales) américains ont atterri en Géorgie en 2002 dans le cadre de la lutte contre Al-Qaida. A l'époque, Vladimir Poutine avait déclaré qu'il n'y voyait "aucune tragédie". Aujourd'hui, il accuse les Etats-Unis d'avoir "créé ce conflit spécialement" à des fins de politique intérieure.
Soucieux d'échapper au tête-à-tête avec le grand voisin du Nord, Mikheïl Saakachvili a toujours cherché le soutien des pays occidentaux. Mais à l'Ouest, on ne comprend rien à ces "conflits gelés", dont les braises ne cessent de rougeoyer. A son arrivée au pouvoir en 2004, le président géorgien a promis de ramener les territoires irrédentistes dans le giron du pouvoir central. Trois mois après son élection, il avait réussi, sans un seul coup de feu, à se débarrasser d'Aslan Abachidzé, le roitelet d'Adjarie (région du sud de la Géorgie, à la frontière avec la Turquie). Sans doute est-il persuadé, quatre ans plus tard, qu'il peut tenter le coup de force en Ossétie en Sud. Au pire, il réussira à internationaliser le problème des "conflits gelés".
Pour Moscou, l'urgence est tout aussi grande. En décembre, l'Alliance atlantique réexaminera la candidature de la Géorgie et de l'Ukraine. Et puis la communauté internationale commence à s'intéresser de plus près à la résolution des conflits. En juillet, le ministre allemand des affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, s'est rendu à Soukhoumi, la "capitale" abkhaze, avec un plan de paix dont il pensait qu'il avait l'agrément des Abkhazes et des Russes. La tentative échoue devant ce qui apparaît comme une volte-face de Moscou. "Steinmeier a été piégé par les Russes", estime une source au sein de l'OSCE. Le Kremlin lui aurait fait miroiter une ouverture avant de sceller l'échec de son voyage, preuve de l'impuissance européenne.
La Russie ne veut à aucun prix que la communauté internationale mette son nez dans ces confettis de l'empire soviétique. Les "conflits gelés" - l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud en Géorgie, la Transnistrie en Moldavie - sont autant de leviers possibles de déstabilisation de la périphérie. Dirigés en toute opacité par des satrapes corrompus à la botte du Kremlin, ces "trous noirs" aux contours flous ont le don de plaire à l'élite politico-militaire russe, obsédée par la restauration de l'empire. "La douleur fantomatique de la perte de l'empire soviétique reste vive, comme un membre amputé que l'on sent encore...", avait coutume de dire le sociologue défunt Iouri Levada (1930-2006).
En quatorze ans, chacun des trois présidents russes a eu sa guerre. En 1994, Boris Eltsine lance les chars à l'assaut de la Tchétchénie ; cinq ans plus tard, Vladimir Poutine met le second conflit tchétchène au centre de sa campagne électorale. Avec l'intervention en Géorgie, l'obsession militaire refait surface. Il fallait bien que Dmitri Medvedev, lui aussi, ait sa guerre.
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Message  setamir Sam 30 Aoû - 23:41

El Watan du 26 août 2008
Par R. I.

Suites du conflit Russo-Géorgien : Des conséquences prévisibles



Les sénateurs ont adopté à l’unanimité des présents 130 parlementaires une déclaration appelant le président russe, Dmitri Medvedev, à reconnaître l’indépendance des deux territoires, lors d’une séance extraordinaire retransmise à la télévision.

« La Russie a respecté pendant plus de 15 ans l’intégrité territoriale de la Géorgie », a déclaré le président du Conseil de la Fédération, Sergueï Mironov, à l’ouverture de la séance. « Aujourd’hui, après l’agression de la Géorgie contre l’Ossétie du Sud, les relations ne seront jamais plus les mêmes », a-t-il ajouté, qualifiant de « génocide » l’offensive des forces géorgiennes dans cette république sécessionniste. « Ni l’Abkhazie ni l’Ossétie du Sud ne vivront plus jamais dans le même Etat que la Géorgie », a renchéri le président abkhaze Sergueï Bagapch. Son homologue sud-ossète Edouard Kokoïti a déclaré que Tskhinvali, la capitale de l’Ossétie du Sud, était « devenue le Stalingrad caucasien » faisant allusion à la bataille de Stalingrad en 1943.

La Douma (chambre basse du Parlement) doit également voter un texte similaire lors d’une séance extraordinaire. Le groupe parlementaire de Russie unie, largement majoritaire à la Douma, soutient le projet de résolution demandant au président russe de reconnaître les deux Républiques, a annoncé le président de la commission des affaires étrangères à la Douma, Konstantin Kossatchev. « Il est maintenant possible de déclarer clairement que le point final de ces années de confrontation, ne peut être qu’une reconnaissance juridique de l’indépendance des républiques, de facto indépendantes, d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud », a déclaré à la presse une dirigeante du groupe Russie unie Tatiana Iakovleva. « Toute autre décision ne fera qu’envenimer la situation », a-t-elle assuré. « Dans une situation où le président géorgien, Mikheïl Saakachvili, a pour but de faire de la Géorgie un 51e Etat américain, les Républiques qui ne souhaitent pas devenir des colonies américaines (...) ont besoin d’aide de notre part », a-t-elle conclu. Le président russe voit, par ailleurs, de « bonnes chances » de règlement du conflit autour de la Transdniestrie, région séparatiste pro-russe de Moldavie, a-t-il dit, hier, lors d’une rencontre avec son homologue moldave Vladimir Voronine. « On a toutes les raisons de parler aujourd’hui du problème transdniestre, je vois de bonnes chances de le régler », a déclaré M. Medvedev lors de la rencontre à Sotchi (sud de la Russie). Les derniers événements dans la république séparatiste géorgienne d’Ossétie du Sud « ont démontré combien les soi-disant conflits gelés peuvent être dangereux lorsque les dirigeants géorgiens ont, comme on dit, perdu la tête », a-t-il ajouté.

Une indépendance de facto

L’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, deux territoires séparatistes de facto déjà indépendants de la Géorgie ont proclamé leur indépendance au lendemain de la chute de l’Union soviétique en 1991 et l’ont défendue par les armes. Un conflit avait déjà éclaté en Ossétie du Sud (3900 km2) fin 1990, lorsqu’elle s’autoproclama « république soviétique ». Cette décision avait alors été rejetée par le parlement indépendantiste géorgien, qui décréta la dissolution de la région autonome. Le 7 janvier 1991, le président soviétique, Mikhaïl Gorbatchev, annule les mesures prises par les Géorgiens et envoie des renforts aux troupes soviétiques stationnées en Ossétie où nationalistes géorgiens et ossètes se confrontaient. Les forces séparatistes ossètes infligent une défaite aux Géorgiens et le 19 janvier 1992, les Ossètes du sud se prononcent par référendum pour leur indépendance et leur rattachement à l’Ossétie du Nord (qui fait partie de la Fédération de Russie). Au terme d’un accord de cessez-le-feu conclu en juin 1992, une force d’interposition tripartite composée de soldats ossètes, géorgiens et russes, est créée et déployée le long de la frontière entre la Géorgie et l’Ossétie du Sud pour maintenir le statu quo. Les incidents ont, toutefois, continué.

Et un conflit a de nouveau éclaté dans la nuit du 7 au 8 août lorsque la Géorgie a tenté de reprendre par la force l’Ossétie du Sud, avant d’être repoussée par une puissante contre-offensive russe. L’Abkhazie, qui était déjà une « république autonome » au sein de la Géorgie (alors république soviétique) à partir de 1930, a proclamé unilatéralement son indépendance en juillet 1992 et l’a défendue par les armes contre les forces géorgiennes. Le conflit qui a fait des milliers de morts et entraîné l’exode de 250 000 Géorgiens, selon Tbilissi, s’est soldé, à l’automne 1993, par la victoire des Abkhazes avec le soutien non déclaré mais efficace de Moscou. Un cessez-le-feu a été signé en 1994, suivi du déploiement de la mission d’observation des Nations unies (Monug) et d’une force russe d’interposition sous mandat de la CEI (ex-URSS moins les pays baltes).

L’accord de cessez-le-feu est cependant resté précaire et des accrochages ont eu lieu régulièrement dans cette région. Les deux provinces, soutenues par Moscou qui a distribué des passeports russes à nombre de leurs habitants, sont coupées du reste de la Géorgie par une véritable frontière, et tournées économiquement vers la Russie, même si Tbilissi n’a jamais renoncé à les reconquérir. Elles ont leur propre gouvernement, parlement et armée mais ne sont pour l’heure reconnues par aucun Etat.
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Message  setamir Dim 31 Aoû - 0:04

L'EXPRESSION du 28 Août 2008
Karim MOHSEN

RECONNAISSANCE DE L’ABKHAZIE ET L’OSSÉTIE PAR LA RUSSIE
L’Occident avait ouvert la brèche avec le Kosovo

(Les Abkhazes et les Ossètes manifestent leur joie après la décision de Moscou)


«Inacceptable», «regrettable», les réactions en Occident étaient aussi dures que prévisibles.

Une levée de boucliers occidentale a accueilli, mardi, l’annonce par Moscou de la reconnaissance de l’indépendance des Républiques séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud par Moscou. Un véritable concert de réprobations.

La secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice «regrette», la chancelière allemande, Angela Merkel, estime «inacceptable» cette reconnaissance, l’Otan «rejette» et la France veut faire condamner, par l’Union européenne, la Russie. L’Otan juge que cette reconnaissance «viole» l’intégrité territoriale de la Géorgie. Mme Merkel estime que celle-ci «(...) contredit le principe de l’intégrité territoriale, un principe de base du droit international des peuples et pour cette raison c’est inacceptable» et Mme Rice de renchérir: «L’intention évidente de la Russie de reconnaître deux zones, deux régions qui ont été en conflit, qui sont manifestement dans les limites des frontières internationales de la Géorgie, reconnues par plusieurs résolutions des Nations unies, me semble regrettable

Ces condamnations et réprobations auraient été conséquentes et appropriées si les mêmes parties avaient fait une lecture uniforme du droit international et de son application par les Etats quand il s’est agi de la Serbie et de son intégrité territoriale, pour ne citer que le dernier cas des errements des politiques occidentaux. Ce qui est loin d’avoir été le cas, le «droit international» semblant dimensionné à l’aune et au gré de celui qui l’exprime. Du coup, il n’a pas la même résonance dès lors que s’en réclament les uns et/ou les autres. Ainsi, les Etats occidentaux qui mettent aujourd’hui en avant le droit international n’ont pas hésité, dans un bel ensemble, à reconnaître l’indépendance autoproclamée de la province serbe du Kosovo. Personne n’avait alors songé au droit international et à l’intégrité de la Serbie, membre à part entière de l’ONU dans sa composante géographique et ethnique reconnue, dixit Mme Rice, par les différentes «résolutions du Conseil de sécurité».

Or, Washington, Berlin, Paris, Londres, qui ont rejeté unanimement la reconnaissance par Moscou de l’indépendance des deux Républiques séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, ont eux-mêmes ouvert cette brèche en reconnaissant imprudemment l’indépendance autoproclamée du Kosovo. Une indépendance qui n’a pas fait l’objet d’une résolution de l’ONU ou de négociations entre les Kosovars et la République de Serbie.
La question n’est pas de défendre la Serbie, mais de faire ressortir la proportion de l’Occident de faire des lectures biaisées du droit international et de son application dans des contentieux comme ceux du Kosovo, de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, dans les territoires palestiniens occupés, au Sahara occidental, ou hier au Timor-Oriental. Or, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud avaient proclamé leur indépendance respectivement en 1994 et 1992. Même Moscou n’avait pas alors jugé politique de reconnaître deux Etats qui lui sont politiquement très proches. Prudence que l’on n’a pas observé chez les Occidentaux qui ont immédiatement reconnu une province (le Kosovo) qui s’est autoproclamée indépendante, du fait que les promoteurs de cette indépendance sont pro-occidentaux et que la Serbie n’avait pas d’atomes crochus avec ce même Occident, ce qui n’est pas le cas de la Géorgie qui frappe aux portes de l’OTAN. Ce qui fait que le précédent du Kosovo n’est pas aussi fâcheux que l’on pouvait le penser, du moins pas pour tout le monde, et entrait en droite ligne avec les luttes de leadership entre l’Occident et une Russie renaissante et à nouveau conquérante, retrouvant peu à peu la puissance perdue de l’ex-Union soviétique.

En réalité, ce qui est inacceptable et regrettable dans le même temps est le fait que les puissances occidentales défendent l’intégrité territoriale de la Georgie -un pays qui leur est proche- invoquant pour ce faire le droit international, tout en faisant passer par pertes et profits l’intégrité territoriale d’un autre pays, la Serbie, pour cause de relations conflictuelles de Belgrade avec les chefs de file de l’Occident. Il est ici, en fait, strictement question d’intérêts et l’Occident ne se souvient du droit international que lorsque celui-ci sert ses intérêts. Car beaucoup de pays voient leur intégrité territoriale violée, sans susciter le holà de cet Occident qui observe alors un silence coupable, souvent complice, mais qui, aujourd’hui, montre les dents et se prétend défenseur du pauvre et de l’orphelin.

Les dossiers du Sahara occidental (dont le cas est identique à celui du Timor -Oriental - ce dernier a trouvé sa solution par le bon vouloir de l’Occident qui a retiré son soutien au dictateur indonésien, Suharto) et des territoires palestiniens, notamment, dont les territoires sont respectivement occupés par le Maroc et Israël, n’ont jamais empêché l’Occident de dormir ou de trouver des justifications à des situations effectivement inacceptables, car en infraction avec la Charte de l’ONU et avec le droit international que l’Occident met aujourd’hui en avant. Aussi, la levée de boucliers, mardi, d’un certain nombre de pays représentant l’Occident est mal- venue et peu crédible au regard du droit international qu’ils prétendent défendre quand leur parti pris dans de nombreuses affaires similaires est flagrant et montre le peu de cas qu’ils font de la loi internationale dès que cela ne les arrange pas. En reconnaissant l’indépendance d’une province (le Kosovo), qui a fait sécession, l’Occident a ouvert la brèche à toutes les minorités en Europe, en Asie, en Afrique et en Amérique dont les premières retombées sont l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie reconnue dorénavant par Moscou. Un pas de plus vers le retour de la guerre froide.
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Message  setamir Dim 31 Aoû - 22:09

Le Quotidien d'Oran du 31 aout 2008
par Kharroubi Habib
Quand Bush s'oublie


«La brutalité et l'intimidation ne sont pas une manière acceptable de mener la politique étrangère au XXIe siècle». Devinez de qui est le propos ? De Mister George W. Bush himself, en réaction «indignée» devant les agissements de la Russie en Géorgie. Venant de lui, la réflexion vaut son pesant de fausseté et de cynisme. Car enfin, le président des Etats-Unis est mal venu de faire la leçon sur ce point à la Russie et à ses dirigeants. Medvedev et Poutine n'ont fait finalement que l'imiter. La brutalité et l'intimidation ont été les constantes de la politique étrangère américaine depuis son arrivée à la Maison-Blanche. Le chaos irakien en est la sanglante illustration. C'est ce même président des Etats-Unis qui a un jour menacé le monde entier en décrétant que «quiconque n'est pas avec nous est contre nous».

Libre à lui de «s'indigner» du comportement russe, mais libre à nous de considérer que ce n'est pas la Russie qui est la plus condamnable dans l'exercice de la brutalité, mais bien son pays. Et si Moscou a décidé de «montrer ses muscles», c'est en réaction à la politique américaine d'encerclement politico-militaire que son administration mène avec arrogance et mépris des équilibres géostratégiques.

Pourquoi la Russie et le monde doivent-ils accepter que les Etats-Unis installent et déploient leur arsenal militaire où ils veulent et pas d'autres? Pourquoi cette logique de force est-elle justifiée quand elle est le fait de l'Amérique et devient dangereuse quand c'est la Russie qui l'applique?

A défaut de pouvoir infliger à la Russie de Medvedev et Poutine le même traitement que celui qu'ils ont administré à l'Irak de Saddam Hussein quand son armée a envahi le Koweit, les Etats-Unis de George W. Bush et leurs alliés européens ont déclenché une véritable guerre médiatique à son encontre. Tous les poncifs de la propagande occidentale de l'époque de la guerre froide ont été ressortis pour réveiller les peurs et les haines que l'ex-Union soviétique a pu susciter. C'est un véritable matraquage antirusse qui s'est déchaîné dans les médias occidentaux. La désinformation, le mensonge et la diabolisation en sont les ingrédients. L'hystérie qui s'est emparée des milieux politique et médiatique occidentaux avec cette guerre du Caucase ayant opposé «l'ogre russe» et le «Petit Poucet» géorgien cache leur désarroi de constater que les lignes des rapports de force internationaux sont en train de bouger au désavantage de leur monde et de ses intérêts et qu'ils sont impuissants à l'empêcher. La Russie a brutalement manifesté sa force contre la Géorgie. Ce n'est pas aux Etats-Unis à lui faire la leçon de morale. Ils ont trop de cadavres dans leur placard. Qu'ils commencent eux les premiers à respecter la légalité internationale et les droits des peuples. Ils pourraient ensuite s'ériger en vertueux défenseurs de ces principes
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setamir
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