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ASSIKEL, AVEC CEUX DU HOGGAR (II)

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Message  setamir Lun 28 Juil - 13:19

El watan du 05 septembre 2004
Par Naima Chekchak


ASSIKEL, AVEC CEUX DU HOGGAR (II)
Voyage au temps des caravanes


...Suite et fin
Assikel : pour raconter le voyage... celui des Imohaghs, Berbères du Sahara central : les Touareg. Assikel signifie voyage en tamahaq, la langue écrite et parlée par eux. Et c’est bien à cet Assikel que nous sommes ici, initiés pour plonger dans sa signification profonde : avec les vaisseaux du désert, c’est une longue méharée qui nous mènera. « Comme au temps jadis », avec les gens du désert pour vivre avec eux la plénitude de cet autre espace... Suivons, donc, notre chef de caravane !

Les oueds : un riche apprentissage de la nature

« Le désert n’a jamais cessé de parler à qui sait l’entendre », dit la maxime. Et à celui qui lui prête ses sens, il lui apprendra, par exemple, cette merveille des multiples instants que je vivrai, là, toute de suite, lorsque nous baraquons pour midi sur notre premier grand oued : l’oued Tagleft, prélude à tous les autres oueds que nous ne cesserons de traverser ou de cheminer durant toute notre méharée et qui se croisent presque tous. A 10 h 30, notre halte, comme toutes les autres, est dictée, parfois, par la présence de l’eau lorsque nous la soupçonnons. Dans ce oued, très arborescent, il se trouve deux gueltas que nous espérons remplies d’eau. Sinon, il n’y a pas de problème. Nos abeyough (guerbas) nous assurent toujours cet élément précieux que nous puiseront au fur et à mesure du voyage, là où cela est possible. Nous baraquons. Systématiquement, Mohamed et Khoni vont chercher des brindilles d’herbe sèche et du bois mort pour notre cuisine, qui commence à la halte toujours par le thé. Pendant que l’équipée est en train palabrer sous notre acacia géant, Khaya prépare le déjeuner, tandis que j’accours vers les gueltas. Et ô merveille ! de l’eau ! « Amane imane ! », « l’eau c’est la vie ! »... Etagées dans un superbe granite bleuté et patiné par le soleil, c’est un parfait écosystème humide que ces gueltas renforcées par l’eau des premières pluies ! Habillé de ces couleurs bleu ciel et orange, un anataghtag (gros lézard commun au Sahara central) ne remarque même pas ma discrète présence, alors qu’il demeure agrippé à la paroi de la guelta. Tel un fond marin, celle-ci abrite une faune et une flore sous l’eau à ravir le regard ! De petits poissons, les uns rouges, les autres blancs, frémillent avec leurs nageoires dorsales, à côté de petits mollusques. « Tiens ! même qu’il y a un petit crabe, là ! Et de petites fleurs blanches, telles des nénuphares ! Des algues d’un autre genre aussi ! Des libellules rouges et violettes qui survolent telle des hélico l’eau !... » Je suis ébahie par ce petit monde du minuscule domaine miraculeux et secret du désert. C’est la « tadéguet », l’après-midi. Il est 16h15. Nous poursuivons l’oued sablonneux, gravissons de nouveau la montagne durant une demi-heure et retombons sur un autre oued, que nous longeons une heure et demie durant. C’est Téhél Araghnine, les canyons jaunes. « Nous sommes à quelque 2000 mètres d’altitude et il est surprenant de se voir facilement passer d’un oued à l’autre, tant ceux-ci s’enchevêtrent tels les fils d’une toile. Des oueds qui se suivent mais qui ne se ressemblent pas. Chacun son charme. Chacun sa particularité. Avec son gros sable. » Téhél Araghnine serpente dans les dédales de parois rocheuses, de grès jaune. Evolution tranquille le long de l’oued. La file chamelière change de forme : tous les compagnons avancent alignés les uns à côté des autres, endulant au rythme des méharas et plaisantant entre eux. Un grand air de joie les anime, accentué par le plaisir de la première rencontre du genre : Ihenkadh ! des gazelles ! Nous soupçonnions, il est vrai, leur présence avec les traces que nous avions observées mais leur rencontre est toujours une réjouissance. Nous ne sommes pas au bout de notre quête. Troisième nuit à notre hôtel aux milliards d’étoiles. Mercredi 30 juillet : nous entamons notre quatrième jour de l’Assikel en poursuivant sur l’oued Téhél Araghnine qui ne tarde pas à nous confier à son élue, le nom, ici féminin de l’oued qui lui succède : Tanafarent : en tamahaq. La halte de la mi-journée que nous y faisons est une autre merveille. Avec Téhél Araghnine et Tanafarent, nous sommes dans les premiers microclimats du voyage où l’eau affleure à même le sol parmi les « tahlis » (roseaux plats et verts), les lauriers roses, le dis, la mousse qui tapisse le sol, ainsi qu’une myriade d’autres plantes aquatiques autour desquelles gravitent libellules, ahankouker (grosses guêpes jaunes et rouges) et autres insectes. Notre chevauchée nous plonge sans cesse dans le monde végétal et animal à mesure que nous pénétrons ces oueds humides de notre cap tantôt nord, tantôt nord-est. Des oueds qui sont aussi, en plus de l’ahenkadh (la gazelle Dorcas), le domaine du moufflon à manchette, l’ouded, fabuleux animal aux yeux d’or que nous rencontrerons plus tard. Les précédentes rencontres botaniques sont de plus en plus appuyées par d’autres plus étonnantes encore : nos nouveaux oueds commencent à nous familiariser avec une flore aussi riche que tedjouq aux vertus cicatrisantes et qui parfume également notre thé. Tassa, autre arbuste aux feuilles dodues curieusement savonneuses (riche en soude) qui servait jadis à la toilette ou à la lessive des nomades et qui résiste à la pluie lorsqu’elle sert au feu de camp. L’afézzou, un graminé qui sert entre autres à la confection de l’asseber, le brise-vent qui orne élégamment les tentes des nomades. Tanetfert et aouhihet bons pour les ulcères et la colopathie. Tadénémi ou le graisse-lèvres qu’utilisent les femmes, explique Mohamed... : une alchimie de plantes aux parfums capiteux qui constituent la pharmacopée populaire et le pâturage des troupeaux de chameaux et de chèvres. La tahat, acacia femelle, du latin Acacias Séyal, trône aussi avec ses boutons de fleurs jaunes à côté de l’acacia Radiana (absagh, très courant) aux boutons blancs. Dans le Hoggar, l’on compte cinq espèces d’acacias, famille des mimosacées... Cheminer dans les oueds est un riche apprentissage de la nature ! Notre caravane continue d’avancer, toujours lentement. Régulièrement, sous nos yeux, gravées au sol, des traces de pas d’animaux de toutes sortes : celles des gazelles s’apparentent à deux traits parallèle furtivement posés par les lancées légères de l’animal. C’est la gazelle Dorcas. Les traces du chacal ont la forme d’un grand trèfle. « Tiens ! Et celles-ci ? Ce sont des traces de gazelles aussi ? » « Kala, kala ! Adérih awagh wan ulli ! » « Non, non ces traces sont celles de chèvres ! », me répond Moussa. Un troupeau de chèvres est en effet passé par là, marquant de son empreinte le passage que nous entreprenons droit devant. Les larges pas de nos montures laissent pour leur part de grandes traces circulaires. C’est l’heure de baraquer sur l’oued Tanafarent. Et c’est en surplomb, sous un grand absagh très épineux, que nous campons pour cette fin de matinée : pas trop près du point d’eau ! La sagesse locale veut que l’on s’écarte toujours des gueltas, aussi grandes ou petites soient-elles, pour ne pas déranger d’autres éventuels voyageurs ou les animaux qui viennent s’abreuver. Sur le gros sable gorgé d’eau, j’observe, amusée, Mohamed, Bokha, Hamayden et Brahim l’air très content, accroupis en cercle et têtes penchées creusant de leurs mains rapides un grand trou : c’est un abankor qu’ils font, un grand trou en profondeur où l’eau, très limpide, est filtrée par le sable. L’abankor nous servira pour remplir les abéyough, faire notre repas, un brin de toilette et enfin pour abreuver nos chameaux. Les abéyough sont suspendus à notre arbre. Leur eau, fraîche et particulièrement désaltérante, est marron en raison du tanin, prélevé du fruit de la taguart (un des multiples acacias), qui est appliqué par les femmes sur la peau de l’abéyough. Tayni, des dattes comme à chaque fois que nous campons pour accompagner notre cérémonial des trois verres de thé, du plus amer au plus doux. A l’horizon est, de gros nuages noirs laissent penser qu’il doit sûrement pleuvoir sur notre destination. Tazrouk. Repas, palabres sous le grand acacia, alors que le vieux Moussa, notre « iminir » (guide) s’en va chouchouter « Zaïtek », un de nos chameaux coursier en lui mettant dans sa gueule quelques restes de pastèques qu’il avale goulûment. Notre sieste se déroule sous les airs très bavards des ahankouker et des cigales.

Une leçon de biologie animale

Au loin, les chameaux sont allés prendre leur repas dans la nature. Sans cesse amusée par plusieurs images insolites que m’offre l’extraordinaire désert, j’observe, le sourire aux lèvres, certains chameaux telles des girafes dans la savane africaine se régaler sur les hautes branches des acacias. Ceci alors que d’autres comme nous font la sieste, mais curieusement, la tête toujours face au soleil ! Pourquoi ? : « C’est pour protéger leur crâne plat de ses brûlures », m’explique Mohamed, et « tu auras remarqué qu’en adoptant cette position face à l’astre, ils ont tendance à tourner avec lui ! » Quel curieux animal et quel apprentissage je fais de lui ! Ma leçon de biologie animale n’est que plus passionnante, car c’est par-dessus tout avec Awragh, mon dromadaire, que je vais en savoir davantage. Très élégant dans ses airs tout aussi aristocrates qu’amicaux ! Entre ce méhari de choix qui m’est dévolu, et moi, une complicité se construira au fur et à mesure de nos périples caravaniers, voilà trois ans. Awragh m’apprendra ce qu’est véritablement un chameau (pardon pour lui encore une fois, un dromadaire !) Digne et fier, il est comme tous les autres, avec son harnachement l’élément de choix de la parure masculine du Targui. Signe d’élégance, Awragh porte autour de son long coup la « tazeguate », collier en laine de chèvre finement tissé. Comme les autres méharas de notre caravane, son cou est également marqué d’un insigne en tifinagh stylisé, présentant une forme de T, fermé par un cercle au bout de sa barre verticale. C’est le sceau par lequel Mohamed marque son troupeau : le T, lettre du féminin dans la langue targuie, symbolise aussi l’« Imottagh », l’« haggaren », le targui noble. Tandis que le cercle représente en tifinagh (écriture Imohagh) le R roulé qui est la première lettre du nom de famille de Mohamed. Awragh, « le Blond » (tous les chameaux portent un prénom en relation avec leur couleur) est un « amali », un étalon qui sert aussi à la reproduction. Ma familiarité avec lui, qui m’a facilement adoptée, m’a permis d’observer ses moindres traits et attitudes. Particulièrement coquet, le crin de son dos est soigneusement tondu. Ses petites oreilles verticales contrastent avec ses grands yeux coiffés de très longs cils recourbés et très fournis, accentuant la douceur de son regard. A observer de très près ses pupilles, je suis surprise ! Elles sont, non pas rondes comme je tendais à le croire, mais en torsades horizontales ! Etonnant ! Et cette bosse plate sur le bas de son buste ? Comme celles sur ses quatre genoux, elle lui sert pour être bien calé au sol, lorsqu’il baraque. Et s’il n’a pas de dents sur la gencive supérieure, c’est pour ruminer le fourrage qu’il a ingurgité en choisissant bien ses plantes préférées ! Quel enseignement me fais-tu Awragh !
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